Nord Californien : Sequoias millénaires, San Francisco, Yosemite en feu, Manzanar, Movie Road et Mustangs

A peine passé la ligne de l’état Californien nous avons la chance de traverser une des plus vieilles forêts de Sequoia au monde, dont certains avoisinent les 2500 ans ! C’est très impressionnant de circuler parmi ces arbres géantissimes, les plus hauts êtres vivants, et lorsque se rajoutent le panorama sur la mer en suivant la côte et la visite des wapitis très près de nous… on se sent encore plus gâtés !

Nous poursuivons le long de la côte et croisons des réserves indiennes, dont une des occupations est de pêcher le saumon. Elle offre de bien jolis points de vue pour nos bivouacs.

Après, ce sont surtout les vignobles californiens qui s’enchainent, comme nous allons sûrement en visiter quelques-uns à Bordeaux nous passons sans nous arrêter. Ni aux maisons de Jack London et Stevenson qui sont hélas fermées les jours où nous y sommes.

Nous arrivons donc rapidement à San Francisco et c’est au son de Maxime Le Forestier que nous traversons le pont emblématique, sous le brouillard habituel de juillet, d’ailleurs si bien décrit dans la chanson !

Contents de nous garer juste en face d’Alcatraz nous réalisons qu’il est impossible de visiter sans réserver les tickets plus d’un mois à l’avance ! Quelle ironie de l’histoire de se dire que longtemps les hommes ont cherché à s’y échapper et que maintenant nous sommes frustrés de ne pas pouvoir y aller !

Ce sont bien d’autres visites qui nous attendaient étant donné que nous avons enfilé 24km à pied pendant cette première journée dans la ville, nouveau record battu après Washington, et avec de sacrés dénivelés en prime ! Cela nous a réchauffés, la surprise à la sortie du camion étant qu’il faisait 11°C dehors, de quoi ressortir manteaux et bonnets en plein juillet.

Jolie ville aux façades pastel, le front de mer est bien aménagé, on peut y voir un sous-marin de la seconde guerre mondiale, des trois-mâts, un musée des flippers et autres jeux d’époque.

L’Exploratorium est le musée des sciences local, toujours aussi bien fichu. Un peu plus loin, toujours sur le front de mer, se trouve aussi le marché couvert de la ville.

Cette fois nous n’avons pas avorté pour autant le musée d’art, d’autant plus qu’il présente une fresque de Diego Riviera sur l’Amérique, beaucoup de Calder, une très belle installation d’Eliasson, etc.

Nous avons poussé jusqu’au downtown avec ses gratte-ciel et parcouru Chinatown toujours aussi exotique.

Le lendemain, après un bivouac bord de plage, nous avons fait la balade dans le quartier Latinos de la ville : Mission, à la recherche des fresques aux messages souvent forts et protestataires.

Nous restait à jeter un dernier coup d’œil au Golden Gate depuis le Presidio, la colline sur laquelle il repose, mais nous ne l’auront toujours pas vu découvert. Le musée Walt Disney, qui se trouve sur la même colline dans d’anciens bâtiments militaires, était fermé pour quelques jours encore hélas.

Nous avons donc parcouru toute la baie vers le sud pour aller voir Palo Alto (une ville emblématique pour les psychologues systémiciens – mais de cela toute notre équipée se fichait), et SURTOUT la Silicone Vallée - de cela en revanche on aurait dit que leur vie dépendait ! Il a fallu aller voir les sièges de Google, LinkedIn, Facebook (Méta en fait avec FB, Instagram et WhatsApp au même endroit), Yahoo… et surtout Apple avec son bâtiment dorénavant emblématique de la marque, l’Infinite Loop. Toute ces compagnies se tiennent dans un mouchoir de poche autour d’un aéroport au sud de la baie. Les rues portent leur nom, les espaces sont immenses, les bâtiments sont très nombreux et, comme dans les campus universitaires, le tout est entouré d’arbres donnant un aspect très vert. L’Université de la Singularité est dans le même quartier mais le bâtiment nous a semblé complètement vide.

Etant donné que nous arrivons bientôt à la fin de notre voyage et donc à la revente du camping-car, nous voulions passer chez un mécanicien pour qu’il jette un œil au moteur et nous dise si tout fonctionne correctement. Il nous a conseillé de changer les pneus avant pour de meilleurs, et a repéré une petite fuite d’huile dans notre pompe à huile de frein, que nous avons donc changée également. En quelques heures le travail était fini et nous avons pu repartir pour la Sierra Nevada, à l’est, avec Yosemite en ligne de mire.

Déjà de loin nous voyions les colonnes de fumée envahir le ciel, et les publications de FB nous avaient renseignées : gros incendie dans le sud du parc. Nous entamons donc la route du nord mais là : blocage. La route est fermée, l’incendie a forci et se trouve maintenant dans le nord. Le sud à réouvert.

Bien, nous allons vers le sud donc, et là mauvaise surprise, il faut avoir réservé des semaines à l’avance pour rentrer pendant les heures décentes dans le parc. Sans réservations, on peut y rentrer jusque 6h du matin, mais pas plus tard ! Réveil mis à 5h nous passons donc la guérite dans les temps le lendemain matin. Nous imaginons la foule qui s’aventurera dans ce parc quelques heures plus tard aux panneaux qui s’échelonnent déjà bien avant la guérite : « A partir d’ici 90 min d’attente » comme à Disneyland ! A peine passés nous constatons avec tristesse les dégâts causés par l’incendie dans tout le sud du parc. Interdit de s’arrêter sur des kilomètres.

Nous arrivons donc aux aurores dans Yosemite Vallée qui se trouve au centre, et profitons des premiers rayons du soleil sur les dômes largement enfumés.  

Pour obtenir leurs précieux badges nos enfants ont cette fois dû participer à un exposé sur les feux dans les parcs nationaux. C’était tout simplement passionnant ! Nous avons appris que les feux étaient nécessaires aux forêts, notamment de Sequoias, qui ont besoin d’espace pour grandir, les petits arbres puisant trop d’eau et ne permettant pas aux grands de survivre. Mais seuls les feux de sous-bois sont nécessaires, dont les arbres sont protégés grâce à leur épaisse écorce. Les feux qui brulent tout l’arbre jusqu’à la cime sont eux bel et bien considérés comme catastrophiques. Lors des feux de sous-bois, les petits animaux s’enterrent et restent dans leurs habitats. Les grands animaux s’enfuient et reviennent en quelques jours. Mais lors des grands feux les petits animaux enterrés brulent et les grands mettent des dizaines d’années à revenir. Or, lorsque les colons sont arrivés, ils craignaient les feux et avaient tendance à les éteindre le plus rapidement possible (contrairement aux indiens qui les laissaient prendre tant qu’ils ne les menaçaient pas). De ce fait, les sous-bois sont devenus trop touffus et ne permettaient pas de réguler cet eco-système. Les pommes de pin ne s’ouvrent et libèrent leurs graines que lorsqu’elles sont chauffées par le feu. Les cendres se révèlent très nutritives et certains rongeurs ont besoin, dans leur alimentation, d’ingurgiter une partie de bois brulé. Les rangers ont donc progressivement appris à déclencher des feux eux-mêmes pour rétablir cet équilibre. Pour cela ils font bien entendu attention aux vents, à l’humidité, à l’altitude etc… et déclenchent donc surtout au printemps ou à l’automne mais jamais en été. Dernièrement ils ont également compris que les feux de printemps dérangeaient certains animaux en voie de disparition, qui avaient besoin de protéger leurs habitats pour leurs petits à cette saison. Ils ne déclenchent que lorsqu’ils savent qu’aucune espèce en danger n’a donc nidifié dans la zone. Ils nous ont également expliqué comment ils éteignent les feux catastrophiques de l’été, qui brulent du bois très sec jusqu’à la cime et se répandent très rapidement. Etonnamment ils les éteignent… par le feu ! Ils creusent un sillon ou abattent une rangée d’arbre à distance de l’endroit qui brûle, attendent un léger changement de vent, allument un « petit » feu depuis le sillon pour qu’il brule tous les arbres jusqu’au « grand » feu, de sorte qu’il n’y ait plus de quoi continuer à alimenter le feu dans cette direction ! En l’occurrence, c’était 4000 pompiers qui étaient en train de combattre un grand feu dans Yosemite. Nous sommes passés devant un véritable camp militaire avec d’innombrables tentes pour loger tout ce monde, des camions d’approvisionnement en eau et en nourriture, d’autres de matériel, des engins de chantier… Toute cette organisation nous a impressionnée !

Nous passons voir tous les jolis points de vue, tombons encore sur un ours, et rejoignons la prairie d’altitude. De là nous avons atteint Tioga pass à 3030m ! De l’autre côte de la Sierra Nevada la descente est plus abrupte et rapide.

Nous arrivons directement sur le lac Mono dont le bord est recouvert de sel.

Nous faisons un petit détour, hélas sur d’affreuses pistes à ornières et tôle ondulée, pour aller voir un des plus grands Ghost Town des USA ! Bodie était une ville champignon typique des chercheurs d’or et comptait 10.000 âmes, faisant d’elle la 2^ème plus grande ville de Californie. Mais deux incendies l’ont largement détruite de sorte qu’elle a été progressivement complètement abandonnée. Tout est resté en l’état, on peut y avoir la table de billard qui a pris la poussière et les médicaments encore rangés dans l’officine… mais comme nous sommes arrivés dix minutes après la fermeture de la barrière d’entrée… nous avons vu tout cela… de loin !

Un peu plus bas se trouve encore une visite vraiment intéressante : le camp de Manzanar. Au lendemain de l’attaque de Pearl Harbor le 7 décembre 1941 le gouvernement américain s’est méfié des 112.000 Japonais habitant sur le territoire, très nombreux surtout à l’ouest du pays. Il a très rapidement pris des mesures assez radicales pour faire face à cela : beaucoup ont eu leur compte en banque bloqué, interdiction de continuer à travailler, confiscation de matériel professionnel (bateaux de pêche, etc.), interdiction de prendre les transports en commun, et rapidement en suivant, obligation de quitter son domicile, déclarant tout l’ouest du pays non autorisé aux japonais. Après quelques semaines d’errance le gouvernement à organisé le déplacement de tous ces japonais dans une quinzaine de « Assembly Centers » ne les autorisant à prendre avec eux qu’une valise. S’organisant à la hâte, beaucoup ont bradé leurs commerces ou maisons avant de partir, confié leurs animaux à d’autres, vendu quelques effets pour avoir de l’argent en liquide. Ils sont arrivés dans ces camps sommaires, avec une promiscuité importante, étiquetés, sans savoir combien de temps cela allait durer. La plupart étaient des mineurs nés aux Etats-unis, parlant et se comportant à l’américaine, ayant appris les noms des présidents américains dans leurs cours d’histoire. Ce qui nous a réellement frappé, c’est l’extraordinaire capacité de réorganisation dont ces personnes ont fait preuve. Ils étaient logés gratuitement (derrière des fils barbelés) et on leur fournissait des denrées alimentaires de base, souvent en boite. Chacun a rapidement retrouvé sa place, les cuisiniers se sont mis à cuisiner pour tout le monde, les médecins et infirmiers ont créé une clinique, une crèche a été organisée, une école aussi, tous les jouets ont été rassemblés dans un bâtiment et un système de prêt a été mis en place pour tous les enfants, les menuisiers ont fabriqué des meubles, il y avait une police des quartiers, un journal, des jardins japonais ont été aménagés, un verger, il y avait des groupes de musique, de danse, et même de majorettes ! Une personne avait laissé ce témoignage « Quand nous sommes arrivés c’était un désert aride et poussiéreux, quand nous sommes repartis, nous avons laissé un jardin construit avec rien ». Certains pouvaient travailler à aider l’armée américaine, par exemple, une usine de fabrication de filets de camouflage a été montée et ceux qui y travaillaient gagnaient entre 12 et 17 dollars par mois. D’autres ont même fait le choix de s’engager dans l’armée américaine (6000 japonais)… des centaines ont péri au front. Cela a duré jusqu’à la bataille de Midway qui a redonné confiance aux américains. A ce moment ils ont demandé aux japonais de remplir un « questionnaire de loyauté » ! 18.000 japonais ont été jugés déloyaux, ils étaient alors envoyés dans des « Segregation Centers », autant dire des prisons. 75% d’entre eux ont émis le souhait de retourner au Japon, seuls 8.000 sont réellement repartis. La sortie de camp des loyaux, après deux à trois ans d’internement, n’a pas été simple. Le gouvernement les laissait partir avec 25$ par personne et beaucoup ont trouvé ce retour à la vie encore plus difficile que l’internement. Ils souffraient du racisme ambiant toujours présent, n’avaient plus de travail ou de maison. Nombreux sont ceux qui ont déménagé sur la côte est pour recommencer une nouvelle vie. Depuis lors le gouvernement a bien entendu fait ses excuses aux japonais pour cette « erreur » de l’histoire.

Avec plus de légèreté nous nous engouffrons en suivant dans les Alabama Hills où la plupart des Westerns ont été tournés – et pas que ! Il s’agit des contreforts de la Sierra Nevada qui offre un arrière-plan enneigé en hiver, un moyen-plan rocheux parfait pour camoufler cowboys ou indiens, et un avant plan de plaines immenses propices aux courses de chevaux ou de diligences. L’endroit est particulièrement « filmogénique », et tout cela à quelques heures de Hollywood ! Selon les besoins, des missions mexicaines y sont construites, ou des villes entières y sont montées et démontées au gré des tournages. Une partie de Gladiator a été tourné là alors que l’histoire de situe en Italie. Maverick, Django Unchained, Iron Man, GI Jane, d’autres films de science-fiction (Star Wars, Star Treck) et de très nombreuses publicités de voiture ont pris place dans ce décor ! Un petit musée amusant dans la ville de Lone Pine voisine recense tout cela et conserve de nombreux objets de ces différents tournages.

Nous devions ensuite traverser Death Valley pour rejoindre Las Vegas mais, renseignements pris, il semble que ce ne soit pas une si bonne idée d’affronter les 45°C à 50°C de cet endroit au milieu de l’été. Nous contournons donc sagement, en profitant tout de même de la vue sur les étendues de sable blanc, et prévoyons de rester sur l’autoroute qui passe entre Death Valley au nord, et le désert de Mojave au sud.

Au milieu de cette traversée du désert nous faisons une dernière halte à l’endroit où les mustangs et ânes sauvages sont amenés une fois capturés. Plus de 40.000 chevaux sauvages sont recensés aux USA, principalement dans le Nevada, et une horde double environ tous les 3 ans !  Le gouvernement régule donc les hordes en tentant d’en domestiquer un certain nombre. Ils sont progressivement approchés par les humains et le but est de les faire adopter. Nous sommes passés voir ces chevaux extrêmement craintifs. A force de patience, en approchant un par un, et plutôt les petits que les grands, avec des pommes (qu’ils ne connaissaient visiblement pas), nous sommes finalement parvenus à une touchette, difficilement !

Enormément de visites pour cette partie de la Californie si riche en patrimoine culturel, historique et naturel ! Nous réservons une balade dans le désert de Mojave pour quand nous serons dans le Nevada voisin, à l’approche de Las Vegas, dernière grande ville à visiter pour nous !