Du psychédélique au Hoop Dance dans le nord du Nouveau Mexique

Après les parcs nationaux et paysages grandioses de l’Utah nous retrouvons l’univers de la ville à Santa Fe au Nouveau Mexique. Ville mélangée d’influences indiennes, mexicaines et américaines, elle a un charme tout particulier que les nombreux artistes de passage ont bien repéré. Impossible de décompter le nombre de galeries d’art qui s'y sont installées, et Georgia O’keeffe, LA peintre surréaliste américaine y a longtemps habité.

Y arrivant en soirée nous avons commencé par une halte tout à fait insolite : un collectif d’artistes a annexé cinq bâtiments pour y créer une œuvre immersive, nous n’avons jamais vu un endroit pareil. Il s’agit d’une maison, un peu spooky, qui à l’air vraiment habitée… et à partir de laquelle on accède, par des passages secrets (dans le fond d’une penderie, dans un frigo, la machine à laver, ou par la porte de la cave, etc…), a des univers psychédéliques, festifs, oniriques, ludiques ou autre. On se promène dans un labyrinthe dans lequel il est très difficile de se retrouver ! De la musique accompagne ces voyages très dépaysants, ainsi que des éclairages changeants, et de nombreuses structures sont animées. On peut par exemple jouer du piano sur les côtes d’un dinosaure, changer les couleurs de murs entiers en tapant sur des dalles, se faire une bataille de boules en frigolite etc. En passant d’un endroit à l’autre on ressent les ambiances différentes donnant l’impression d’être dans un dessin animé, dans une roulotte, sur les planches d’une boite de nuit, dans une rue en Inde, dans un sachet de bonbons (avec les odeurs!), dans un aéronef, etc. Il est très difficile de rendre tout cet univers si vivant en photos !

Le lendemain nous allons sur le Museum Hill de la ville où plusieurs musées sont dédiés aux indiens. Dans le premier, avec une chance folle, nous tombons par hasard sur un concours de Hoop Dance pour les enfants. Il s’agit d’une dance traditionnelle habituellement effectuée par les hommes dans les pow-wow qui rassemblent les clans. Lors de la danse, des figures rituelles représentant la plupart du temps des animaux (loups, chevaux, serpents, condors, etc.), sont présentées par les danseurs empêtrés dans leurs cerceaux. Ils sont accompagnés par les hommes plus âgés aux chants et tambours. Mais il y a une dizaine d’années, cette tradition était à bout de souffle et seuls une poignée détenaient encore ce savoir-faire et étaient reçus comme des pop stars aux festivités. L’un d’entre eux a décidé de redonner du corps à la discipline et a créé une école afin de l’enseigner aux plus jeunes, et autorisant dorénavant l’accès aux filles. En discutant avec un des organisateurs indiens de la journée, il nous a expliqué qu’il déplorait le fait de devoir faire un concours de ce type de danse alors qu’il ne s’agit pas originellement d’un acte compétitif, mais, lucide, il le voyait aussi comme un passage obligé pour ne pas perdre à tout jamais une partie importante de sa tradition… Tous présentaient finalement avec fierté une partie de leur jeunesse qui se saisissait d’un bout de leur culture ancestrale. Le cran de ces enfants qui dansaient seuls devant tout le monde sous un soleil de plomb accompagnés des tambours puissants et sonores nous a retenus et impressionnés.

Le musée attenant est organisé en grands thèmes : les ancêtres, la langue, les cycles de vie, etc. Il est moderne et très bien conçu. Nous avons appris qu’entre les deux guerres mondiales les Indiens avaient l’interdiction de parler leurs langues maternelles à l’école, ils devaient s’en tenir à leur deuxième langue commune, l’anglais. Mais pendant la deuxième guerre mondiale, c’est le Navajo qui a été retenu comme langage codé pour l’armée. Les Indiens étaient donc postés à des endroits stratégiques et communiquaient entre eux par radio uniquement en Navajo. Ce « Code Navajo » n’a jamais pu être percé par les japonais. Une grande partie du musée est consacrée au monde contemporain, à la façon de vivre et à l’art actuel des tribus indiennes.  

Dans le joli centre historique de Santé Fe l’espagnol prédomine, la chaude lumière de l’après-midi vient colorer les maisons en adobe, les touristes sont plus nombreux…

Nous allons encore voir un dernier musée, celui, plus classique d’art du Nouveau Mexique.

Puis nous faisons un détour plus au nord en direction du village de la réserve indienne de Taos. En chemin nous nous arrêtons pour un bivouac sur une aire de repos dominant les gorges du Rio Grande.

Taos est un village des Indiens Pueblo habité depuis plus de 1000 ans. Auparavant on pouvait s’y promener comme dans n’importe quel village… Mais les affres du tourisme sont de nouveau passées par là, dorénavant il est ouvert de 9h à 16h. Nous sommes accueillis par une horde de sbires qui nous dirigent sur un parking puis au guichet d’accueil pour s’acquitter d’une taxe replète. On peut ensuite faire partie d’un tour organisé pour déambuler dans les rues… cette fois-ci il n’est pas (encore) obligatoire… heureusement ! On ne trouve que des boutiques à touristes vendant grosso modo le même type d’artisanat. Tous vendent également du pain cuit dans leur four traditionnel, un des objets phares de l’endroit. Un homme plus âgé pousse le chant et le bâton de tambour à quiconque passe le pas de son commerce. Notre ainé, moqueur, me glisse à l’oreille « Non mais maman, il n’y a rien du tout qui a mille ans ici, ces maisons en terre ne tiennent pas mille ans, ils les refont tout le temps… c’est obligé.» Je n’ai même pas pu lui répondre que ce qui est touchant c’est que le lieu est habité depuis 1000 ans par la même communauté, parce qu’en réalité, le village n’est même plus habité. On n’accède qu’à la partie centrale, le reste n’est sans doute plus restauré régulièrement si bien que l’ensemble des ruelles transversales sont barrées. Cependant, nous devons reconnaitre que, même si le village ne l’est plus tellement, les gens se sont avérés plutôt authentiques et très sympathiques, malgré le fait qu’ils voient défiler des milliers de touristes chaque année.

Retour à Santa Fe puis Albuquerque où sont répertoriés de nombreux pétroglyphes des Indiens mais aussi des premiers colons espagnols arrivés depuis le Mexique.

Et en quelques tours de roues nous arrivons en Arizona !